Une hospitalité parfois naïve, ou sans discernement, ou encore pleine de complaisance ou d 'indulgence peut conduire à de bien mauvaises surprises, à des expériences lourdes de conséquences hypothéquantes... ou à pire encore. De mauvaises fréquentations, des habitudes néfastes naissent de rencontres et de relations qui se sont tissées faute de vigilance et de fermeté... Il faut y regarder à deux fois avant d 'introduire chez soi certains visiteurs. Et toujours se rappeler - pour en tirer leçon dans la pratique - ce que dit la Bible : « C 'est à ses fruits que l'on reconnaît un arbre ›› !
« Quelques années avant ma naissance, mon père connut un étranger récemment arrivé dans notre village. Depuis le début, mon père fut subjugué par ce personnage, si bien que nous arrivâmes à l'inviter à demeurer chez nous. L'étranger accepta et depuis lors il fit partie de la famille. Moi je grandissais et je n'ai jamais demandé d'où il venait. Tout me paraissait évident. Mes parents étaient enseignants. Ma maman m'apprit ce qui était le bien et le mal et mon père m'apprit l'obéissance.
Mais |'étranger était un conteur et un enjôleur. Il nous maintenait pendant des heures fascinés par ses histoires mystérieuses ou rigolotes. ll avait la réponse à tout ce qui concernait la politique, I'histoire ou les sciences. Il connaissait tout du passé, du présent. Il aurait presque pu parler du futur! Il fit même assister ma famille à un match de football pour la première fois.
Il me faisait rire et il me faisait pleurer. L'étranger n'arrêtait jamais de parler et ça ne dérangeait pas ma maman. Parfois cependant elle se levait, sans prévenir, pendant que nous continuions à boire ses paroles. Je pense qu'en réalité elle était partie à la cuisine pour avoir un peu de tranquillité (maintenant je me demande si elle n'espérait pas avec impatience qu'il s'en aille).
Mon père avait ses convictions morales mais l'étranger ne semblait pas en être concerné. Les blasphèmes, les mauvaises paroles par exemple, personne chez nous, ni voisins, ni amis, s'y serait permis. Ce n'était pas le cas de l'étranger qui se permettait tout, offusquant mon père et faisant rougir ma maman.
Mon père nous avait totalement interdit l'alcool. Lui, l'étranger, nous incitait à en boire souvent. Il nous affirmait que les cigarettes étaient fraîches et inoffensives, et que pipes et cigares faisaient distingué. Il parlait librement (peut-être trop) du sexe. Ses commentaires étaient évidents, suggestifs et souvent dévergondés. Maintenant je sais que ma mentalité a été grandement influencée par cet étranger pendant mon adolescence. Nous le critiquions mais il ne faisait aucun cas des valeurs de mes parents, et malgré cela, il était toujours là !
Cinquante ans sont passés depuis notre départ du foyer familial. Et depuis lors beaucoup de choses ont changé. Nous n'avons plus cette fascination. Il n'empêche que si vous pouviez pénétrer chez mes parents, vous le retrouveriez quand même dans un coin, attendant que quelqu'un vienne écouter ses parlottes ou lui consacrer du temps.
Voulez-vous connaître son nom ?
- Nous, nous l'appelions... téléviseur.
- ll a maintenant une épouse qui s'appelle ordinateur et qui fricote avec internet.
- Un fils qui s'appelle « portable ››.
- Et un neveu pire que tout ! Lui c'est le smartphone.
Seigneur, s'il te plaît, libère-nous de cet esclavage. ››