par Paul Vandenbrœck (Radio réveil 1978)
Nécessité de la naissance spirituelle
Et puis,
à quoi cela sert-il? Pourquoi compliquer ces choses toutes simples qui se sont
passées au premier Noël? C’était pendant l’occupation romaine. Il
fallait aller chercher son laisser-passer dans son village d’origine. Un
homme, charpentier-maçon de son état, est venu à Bethlehem avec sa jeune femme
enceinte. Tous les hôtels affichaient «complet». Et puis voilà que la
jeune femme doit accoucher. Cela se passe dans une étable ou dans une
grotte. L’enfant est aussitôt couché dans une crèche, une mangeoire pour
les moutons. Comme quoi, dans la vie, il faut tirer parti de tout ! Et
alors ? Pourquoi tant de paroles, tant de discours, sur cette
naissance plutôt banale, après tout ? Il naît des bébés tous les
jours dans des taxis, des avions, par surprise en somme, pourquoi pas
dans une étable? Et si l’on agrémente l’histoire d’un cortège de bergers, de
l’adoration des mages et du «chantez hautbois, résonnez musettes»,
n’est-ce pas simplement délicieux ? A trop vouloir réfléchir,
n’allons-nous pas nous gâter ce plaisir éphémère, mais si délicat d’un
Noël poétique?
Nous
sommes déjà tellement envahis par la notion de l’utilité des choses, c’est
devenu le critère encombrant de toutes les inventions, productions,
recherches... «Ça sert à quoi?» Horrible question, préoccupation terre à
terre et qui ne vous épargne pas même sur le plan de la foi, avec des
slogans comme: «Dieu, pour quoi faire?» Affreux! N’y aurait-il plus que
quelques poètes, la tête dans les nuages, ou quelques sculpteurs farfelus
qui fassent des choses qui ne servent à rien? Pourquoi ne pas laisser
à Noël sa poésie, sa tendresse, sa musique, «l’étable qui sent la
paille, l’enfant qui sent le frais, et le chien qui sent le chien», comme
le disait Landry?
En
réponse à ces questions, je cite à nouveau Silesius : «Vois-tu, Jésus-Christ
pourrait naître 1000 fois encore à Bethlehem, s’il n’est pas né en toi, tu
es perdu». La question n’est pas de savoir si «ça peut servir», si Noël
a une certaine utilité ou non. Le problème échappe d’emblée à nos calculs.
Ni envolées poétiques, ni calculs bassement matérialistes ne sont de mise ici. C’est une question de vie ou de mort.
«S’il n’est pas né en toi, tu es perdu!» «Celui qui ne croit pas au Fils de Dieu, la colère de Dieu demeure
sur lui», dit la Bible. Et encore: «C’est une
chose terrible que de tomber entre les mains du Dieu vivant!» (Evangile
de Jean 3:36, épître aux Hébreux 10:31).
Dites-moi,
qui aurait l’outrecuidance de réciter des vers à un homme qui se noie et
appelle à l’aide? Qui oserait lui répondre: «Eh oui! Mon ami, être ou ne
pas être, c’est toute la question» ? Que faut-il à l’enfant distrait qui
joue sur la chaussée: un clown sur le trottoir ou une
poigne énergique qui l’y ramène aussitôt? Que demande le malade
oppressé: un divertissement musical ou le remède qui le soulage ?