dimanche 1 août 2021

LA PREUVE DECISIVE

 


Par Ruben Saillens (Croire et Servir) (Réalités de la Foi 1992.03)

«Le célèbre ténor Caruso, qui était alors à New-York, se présenta un jour dans une banque de cette ville pour encaisser un chèque. La somme étant assez élevée, le payeur lui réclama des pièces d'identité et se montrait d'autant plus exigeant qu’il était allé entendre le chanteur et ne le connaissait pas sous ses habits de ville. Caruso avait vidé son portefeuille et exhibé toutes les enveloppes de lettres, sans parvenir à convaincre le méfiant caissier. Tout à coup, il lui vint une idée: il entonna un air de la Tosca et, du coup, la conviction fut faite. Le chèque fut payé illico, tandis que les applaudissements frénétiques éclataient à tous les guichets de la banque...»

Ce simple fait divers à fait naître en nous quelques réflexions. L'identité d’un homme peut donc se prouver de deux manières: ou par des évidences extérieures (certificats, passeports, etc.), ou par des évidences d’un ordre différent, plus subtiles à discerner, mais aussi sûres et certaines pour celui qui sait les reconnaître. On peut voler les papiers d’un chanteur de talent et se faire passer pour lui. Mais on ne peut lui voler sa voix. Ayez tous les papiers de Caruso, sans sa voix, je vous tiendrai pour un imposteur; ayez sa voix, et je vous tiens quitte de tous les papiers. Appliquez ce principe au plus grand de tous les problèmes : celui de la vérité religieuse.

 Voici un homme qui se présente à nous, à travers dix-neuf siècles, comme la Révélation parfaite de Dieu, la voix de la justice et de l'amour éternel. Quelle preuve nous faudra-t-il pour être convaincus que cet homme est vraiment le Fils de Dieu, venu sur la terre pour sauver le monde? 

Des savants - philosophes, théologiens et autres - armés de lourdes besicles, examinent minutieusement les documents qui contiennent l’histoire de Jésus-Christ et les prophéties qui le concernent, et nous disent sur un ton pédant: «Ces preuves ne nous suffisent pas. Elles peuvent avoir été forgées. Tous ces papiers sont admirables et bien en règle, mais qui sait s’ils sont authentiques?» 

Et voilà le pauvre peuple, troublé par ces prétendus sages, qui commencent à se demander si Jésus-Christ est vraiment celui qui devait venir, ou s’il lui faudra en attendre un autre. Car le peuple attend toujours son Messie! Les savants peuvent, un moment, le détourner du véritable libérateur, mais ils ne peuvent pas l’empêcher d’en avoir un, d'en vouloir un à tout prix! Eh bien! Pauvre peuple, à quoi pourras-tu connaître si celui-ci est véritablement celui que Dieu t’envoie? Écoute-le! Le conseil nous vient d’en haut, il nous vient de Dieu lui-même! Dieu aurait s’imposer par des évidences extérieures; il aurait pu nous contraindre à reconnaître son Fils comme notre roi en l’entourant de tous les signes visibles de la puissance et de la gloire. Mais non! En le présentant au monde, il le montre dépouillé de toute grandeur surnaturelle; il ne lui est rien resté de céleste... que sa voix! 

Mais sa parole, c’est lui-même; toute sa vie, toute sa mort, sa résurrection. Il était la Parole auprès de Dieu dans le ciel; il est la Parole de Dieu sur la terre. Il n'a ni sceptre, ni couronne, ni ange pour le servir! Il parle, et quand on l’écoute avec un cœur bien disposé, avec une conscience ouverte, avec un esprit droit, on reconnaît dans ses paroles l'accent de la vérité éternelle. On ne dédaigne pas les autres preuves, certes; mais elles deviennent secondaires; on croit en lui parce qu’on l'a entendu soi-même et non seulement parce que d’autres l'ont entendu. Imaginez cependant que le caissier eût été sourd. C'est en vain que Caruso aurait déployé tout le prestige de sa voix; l’homme du guichet aurait dit: «Vous chantez, j’en suis fort aise, mais cela ne suffit pas. Il me faut des papiers, dûment timbrés et paraphés!» 

Pauvres sourds, qui ne savent pas entendre et reconnaître la voix de Dieu dans les Écritures et à qui il faut d'autres preuves pour qu’ils daignent croire en la divinité de Jésus-Christ! Ce qui est vrai pour le maître l’est aussi, à un degré différent, pour les disciples. A quoi reconnaît-on le véritable chrétien? À son certificat de baptême ou de première communion? Il est trop facile de se procurer de tels certificats sans l’ombre d'une profession de foi! On reconnaît le vrai chrétien à sa voix: je veux dire au témoignage de sa vie. Quand la parole n'est pas seulement le discours, c'est tout ce qui s’exhale de l'homme qui le révèle au dehors. Chante donc, chrétien, par ta vie entière, l’hymne de la grâce, de la foi et de l’amour! Chante quand d’autres hurlent, ou blasphèment, ou pleurent. Chante humblement mais joyeusement, la louange de ton Rédempteur.

 Que ta vie soit un cantique, comme celle de la fleur et de l’oiseau, mais avec toute la conscience d’un esprit libre et toute l'humilité d’un cœur repentant. C’est à cela que les hommes - ceux qui ont des oreilles pour entendre - reconnaîtront l'authenticité de la foi et, après t’avoir entendu, ils voudront aller plus haut, jusqu'à Celui qui est ton Maître et qui seul a chanté l'hymne parfait de la Vérité, de la Justice et de l'Amour!