E- EVRARD. (Rayon parmi les ombres)
Dieu
pouvait-il nous adresser un meilleur message ? Et pouvait-il l’appuyer plus
efficacement qu'en envoyant son propre Fils sur la terre, où vivent des hommes
rebelles, envieux, orgueilleux, injustes, belliqueux, cruels ?
Il ne
pouvait faire mieux, Lui qui fait tout à merveille. Aussi, nous répéterons avec
conviction, joie et reconnaissance le message de Noël : Paix sur la terre !
Pourtant,
nous avons le cœur douloureux, parce que la terre ne connaît pas la paix, parce
qu'elle est toujours ensanglantée et ravagée par les guerres les plus
honteuses, parce que des atrocités se commettent, que des hommes
s'entr’égorgent, et que de nombreux foyers sont dans le deuil et dans les
larmes, malgré le message de Noël.
Que de
fois, pleine de reproche ou d'angoisse, la question nous est posée :
—- Que
faites-vous donc, les hommes pieux, pour empêcher les guerres, pour exaucer ce
vœu : Paix sur la terre ! A quoi sert donc votre message ?
Evidemment,
nous prétendons avoir l'Evangile de paix ; c’est donc bien simple de nous
mettre au pied du mur. Mais l’Evangile n’est utile qu'à ceux qui le
reçoivent et le mettent en pratique, comme l’eau et le savon ne lavent que
ceux qui s’en servent. Nous essayons d’éclairer, de guider vers la paix les
hommes de cette humanité ; mais s'ils pensent avoir un meilleur moyen que le
nôtre, et s’ils préfèrent se servir de leur force pour arriver à la paix, nous
parlons en vain. Il en est, aujourd’hui, comme de tout temps :
« Les hommes
préfèrent les ténèbres à la lumière parce que leurs œuvres sont mauvaises ». Pourquoi nous faire
des reproches sous forme de questions lorsque le malheur est à la porte ?
Pourquoi, quand il en est temps, quand les jours sont plus calmes, plus
sereins, ne pas écouter le message de repentance, de réconciliation avec Dieu,
d’obéissance à la vérité, d'amour du prochain, de paix avec tous les hommes?
Nous ne sommes pas, plus que les autres, des magiciens de la paix. Mais nous
avons reçu le ministère de la Réconciliation — qui vaut tout de même mieux que
le ministère de la Guerre — et : « Nous vous en supplions, au nom du Christ
: soyez réconciliés avec Dieu ! ».
Lorsque
l’innocence en pleurs quitta la terre pour retourner au ciel, il est certain
que la paix s’en alla avec elle. Ce ne sont pas les hommes qui produisent la
paix, ce sont eux qui la chassent. Pas plus que l'innocence, la paix ne peut
s’accommoder de nos péchés : mensonges, convoitises et injustices, ni
dans la vie personnelle, ni dans la vie familiale, ni dans la vie sociale, ni
dans la vie internationale.
Pourtant,
les hommes essaient toujours de réussir ce tour de force insensé : faire
cohabiter la paix avec leurs iniquités ; mais c’est impossible. Ils ont beau
faire l'élevage de colombes, ils se battent quand même sur la question de
savoir si la vraie colombe de la paix sera bleue, blanche ou rouge. « Paix,
paix, disent-ils, et il n’y a pas de paix... à moins, dit Dieu, qu'on n’ait
recours à ma protection et qu’on ne fasse la paix avec moi, oui, la paix avec;
moi ! ». De tous les moyens mis en œuvre, armements et diplomatie, « on
attendait la paix, mais il n'arrive rien de bon ; on espérait une ère de
relèvement, et voici la terreur... il n’y a pas de paix pour les méchants,
dit l’Eternel ! »
Aussi,
pourquoi appeler le message : Paix sur la terre, un vœu ?
Si c’en
était un, nous ne serions guère avancés. Un vœu ne change rien à la situation,
surtout quand les hommes ne font pas ce qu’il faut pour le réaliser. Dieu fait
infiniment mieux que de formuler un vœu : il ouvre le chemin de la paix, il
déclare la paix aux hommes, et dans sa bienveillance envers eux, il la leur
donne en son Fils dans la nuit de Noël. Encore, en faut-il accepter les
conditions.
Le
problème est donc celui-ci : Comment retrouver notre innocence pour
retrouver notre paix ? Ce problème est insoluble sans Dieu.