(Le Protestant
béarnais 1910-02)
« Ne
reconnaissez-vous pas, disait aux chrétiens de Corinthe le même apôtre, que
Jésus-Christ est en vous? » (2
Cor. 13/5.) Et toutefois ces chrétiens avaient encore tant de progrès
à accomplir, tout comme ceux de la Galatie, comme toi-même, cher lecteur,
qui a cru en ton Sauveur, et comme moi, qui trace ces lignes. Oh! que
d’infirmités nous gardons encore, que d’inconséquences à
déplorer, que de résistances doit surmonter en nous la grâce divine!
Et pourtant Christ est là, oui, il a commencé de se former en nous et
sa vie de jeter des racines en nos âmes. Mais ces racines doivent devenir
plus profondes, plus envahissantes, jusqu'à qu’elles occupent toute
la place. Les pensées de Christ doivent devenir nos pensées, les mouvements
qu’inspire son Esprit doivent se produire ordinairement dans nos cœurs, et
comme il juge de toutes choses, ainsi devons-nous en juger nous-mêmes. A
ce développement intérieur, doit correspondre la vie extérieure, je veux
dire nos paroles et nos actes.
Rappelons-nous ici comment s’exprimait Jésus lui-même
; « Je juge selon que j’entends. — Les
paroles que je dis, je ne les dis pas de moi-même. — Le Père
est celui qui accomplit les œuvres que je lais. » Tels étaient
les rapports de Jésus avec son Père. Il les résumait en ceci :
« Je suis en mon Père et mon Père est en
moi. » Tout semblables sont les
rapports que nous devons soutenir avec Jésus. A son tour, Il veut
être en nous. Mais voici bien la différence. En lui nulle résistance à la
pensée et à l’amour du Père. En Lui, nulle place qui restât étrangère à la
vie divine qui était en Lui, et son être en était pénétré d’une façon
si parfaite, qu’il pouvait dire : «Le
Père et moi nous ne sommes qu’un. »
Hélas, la terre que contient le vase de nos cœurs est
au contraire dure et résistante; et ce n’est point sans un incessant combat que
la vie de Christ peut se développer en nous. Dieu lui-même — qu’Il en soit
béni ! — travaille heureusement à amollir les mottes et à briser la
résistance. A cela sert sa Parole, épée qui pénètre, ou marteau qui écrase. A
cela aussi contribuent les tribulations et les épreuves par lesquelles il
nous faut passer, et toutes ces dispensations, qui parfois
nous étonnent et contre lesquelles nous serions disposés à nous
insurger, mais qui ont leur rôle bien déterminé dans la pensée de
notre Père et en vue de la réalisation de son bon dessein à notre égard.
Ayons donc envers lui une confiance toujours
grandissante. Abandonnons-nous entre ses mains d’une manière toujours plus
complète. Devenons absolument dociles, attentifs à sa voix, obéissants
en toutes choses. Fermons l'oreille aux voix étrangères. Sachons dire
résolument : Arrière de moi ! au tentateur. En un mot, demeurons dans
la foi, ou, comme Il le dit Lui-même, demeurons en Lui et
Il demeurera en nous. Oui, l’œuvre commencée ne manquera point alors,
soyons en sûrs, d’atteindre son plein accomplissement. Nous n’aurons pas
cru en vain, écouté en vain, obéi en vain. « celui qui nous a appelés est fidèle. » Mais, en aucune
façon, ne nous relâchons point « Jusqu’à
ce que Christ soit formé en nous », c’est-à-dire jusqu’à-ce que, de
petits enfants que nous aurons été tout d’abord, nous atteignions « la mesure de la stature parfaite de
Christ ».